Pour la majorité des Québécois, quand on parle de tourisme, c’est souvent comme synonyme de vacances: une semaine dans un tout-inclus des Caraïbes, un séjour en Europe ou encore un long week-end à Boston. On tend néanmoins à occulter le fait que du tourisme, il s’en fait aussi au Québec, de l’excellent même, et que cela représente en fait une industrie vigoureuse.
Mais bon, vous pensez peut-être qu’il s’agit d’une industrie de second ordre, qu’on y fait des affaires frivoles basées sur quelques festivals, des prestations hôtelières et quoi encore? Détrompez-vous! Selon le rapport du Comité Performance, présidé par Gilbert Rozon et déposé à la Ministre Nicole Ménard lors des Assises du Tourisme en juin dernier, l’industrie du tourisme au Québec, c’est:
- 10,4 milliards $ de revenus et 2,5% du PIB
- 30,000 entreprises
- 400,000 emplois
- 5e rang des principaux produits d’exportation
- Un des secteurs les moins coûteux à développer et des plus rentables en création d’emplois
Une industrie importante mais fragmentée
Le plus grand problème de l’industrie touristique réside dans sa fragmentation et, de ce fait, dans sa faible représentation auprès des instances gouvernementales. Un exemple? Les transporteurs, que ce soit du domaine de l’aviation, du rail, de l’autocar ou de l’automobile, ont tous des associations qui les représentent pour effectuer un lobby auprès des autorités compétentes.
Il s’adonne pourtant que les transporteurs sont, eux aussi, partie intégrante de l’industrie touristique, mais on oublie souvent cette facette. Il en va de même pour la plupart des rouages de l’industrie touristique: restauration, hébergement, attraits et événements. Toutes ces composantes jouent un rôle au quotidien auprès des citoyens et de la clientèle locale, mais revêtent un aspect tout aussi important auprès de la clientèle d’excursion et de destination – celle-là qui se déplace sur une distance de plus de 80km pour se rendre (excursion), ou en incluant au moins une nuitée d’hébergement (destination).
Mise en place d’une approche concertée
L’industrie touristique québécoise est consciente de sa fragilité actuelle. Les infrastructures hôtelières et attractions touristiques vieillissent, le dollar canadien fort désavantage la balance touristique vis-à-vis de la clientèle américaine, la compétition internationale et l’émergence de nouvelles destinations font mal. Alors, que faire pour retrouver le chemin de la croissance? Dans la foulée du rapport Rozon, un Comité Directeur a récemment été mis sur pied, rassemblant une trentaine de leaders de l’industrie.
L’objectif sera de proposer des pistes de solution auprès de la ministre du Tourisme, Mme Nicole Ménard, afin que soit déposé un plan d’action concret d’ici les prochaines Assises du Tourisme, en juin 2012. D’ici là, je vous propose les trois défis sur lesquels notre industrie aurait avantage à se concentrer si l’on souhaite effectivement (re)dynamiser le tourisme au Québec: l’accessibilité, le produit, et les structures. (Je traiterai du produit et des structures dans mon prochain billet)
1. Accessibilité
Le premier et plus gros défi que nous avons, au Québec, est celui de l’accessibilité. Cette accessibilité se décline en deux volets: pour se rendre à une destination, puis une fois rendu à destination.
Pour un Britannique, un Espagnol ou un Français, venir au Québec coûte deux à trois fois plus cher que pour des vols intra-Europe mais également pour l’Asie, voire même jusqu’en Australie ou la Polynésie. Pourquoi? En premier lieu, le monopole d’Air Canada sur les marchés internationaux ne joue pas en faveur du consommateur. De plus, il faut bien l’avouer, nos transporteurs aériens doivent composer avec les taxes aéroportuaires parmi les plus élevées au monde – quand atterir à l’aéroport Pearson de Toronto coûte plus cher que Charles-de-Gaulle à Paris, on peut se poser des questions…
À une époque où les voyageurs recherchent commodité et fluidité dans leurs transports, les vols directs sont plus que jamais convoités. Or, la plaque-tournante d’Air Canada est Toronto depuis maintenant deux décennies, même si Montréal continue de tirer son épingle du jeu, surtout sur les marchés européens. Mais combien de vols directs sur Québec? Trop peu, même si la situation s’améliore d’année en année depuis le début des années 2000, et particulièrement dans la foulée du momentum créé par les festivités du 400e en 2008.
L’enjeu des aéroports
Une fois rendu à destination, qu’en est-il de la mobilité des voyageurs? Quand on débarque à l’aéroport international Trudeau de Montréal, le rond-point Dorval et les routes pour se rendre à Montréal sont notoires, mais pas forcément pour les bonnes raisons. Vous débarquez à l’aéroport Jean-Lesage de Québec et souhaitez vous rendre directement skier au Mont Ste-Anne ou au Massif de Charlevoix? Bonne chance!
Ces problèmes ne sont pas exclusifs au Québec, ni au Canada. D’ailleurs, le gouvernement fédéral vient tout juste de déposer sa “stratégie fédérale en matière de tourisme” dans laquelle on retrouve quatre priorités dont celle de faciliter l’accès et les déplacements des touristes. Plus souvent qu’autrement, l’équation économique soutient difficilement la mise en place d’un service de navette courant et fréquent, pour une masse critique de population faible par rapport à une surface géographique large à couvrir. En Europe et en Asie, particulièrement au Japon, on observe les deux phénomènes inverses, ce qui est plus propice au développement d’un réseau de transport collectif offrant quantité et qualité.
Les deux autres défis à relever en tourisme au Québec: le renouvellement de l’offre (le produit), et repenser les structures de soutien en tourisme. À lire, dans la deuxième partie de ce billet, au retour de l’Action de Grâce!
Laisser un commentaire