Blogue de Frederic Gonzalo

Le centre de villégiature de Tremblant

Le tourisme d’affaires, ce négligé non-négligeable!

Quand il est question de tourisme et de l’industrie touristique, on parle plus souvent qu’autrement de tourisme d’agrément, parfois mieux reconnu sous son appellation anglophone leisure travel. Que ce soit à l’international, sur le marché canadien ou le marché domestique intra-Québec, le tourisme d’agrément est naturellement celui qui domine les stratégies et investissements des régions, provinces et principaux intervenants de l’industrie.

Normal, car il vise la population générale, un bassin au potentiel vaste dans la plupart des marchés géographiques de la planète. À un point tel que certains estiment qu’on néglige un segment prometteur et payant mais trop souvent rélégué au second plan: le tourisme d’affaires.

ÉNORME POTENTIEL

D’abord, que veut-on dire par “tourisme d’affaires” ? On réfère habituellement aux catégories suivantes de voyages :

  • Réunions d’affairesRencontres d'affaires
  • Voyages de motivation (incentive)
  • Congrès, colloques, symposium ou événements
  • Marché associatif
  • Groupes, clubs sportifs, étudiants, culturels, etc.
  • Événements spéciaux: partys de Noël, mariages, bals de finissants, etc.

En 2012, la US Travel Association estimait que 30% des revenus totaux générés en tourisme provenaient du tourisme d’affaires, ou ME&I (Meetings, Events & Incentives).

Or, ce segment ne représentait que 8% des voyageurs! En d’autres mots, le voyageur d’affaire dépense beaucoup plus que le voyageur d’agrément, dans une proportion pouvant aller de quatre à vingt fois plus, selon qu’on compare les clientèles domestiques ou internationales, notamment.

On penserait donc que le tourisme d’affaires figure au sommet des priorités dans le plan d’action de la Commission Canadienne de Tourisme (CCT) ou de Tourisme Québec? Erreur. Allez jeter un coup d’oeil dans le plan corporatif quinquennal 2013-2017 de la CCT, un document de 38 pages disponible sur leur site web: pas un mot sur le tourisme d’affaires!

Dans le plan de développement 2020 de Tourisme Québec? Sur les 59 pages que comporte le document, on ne retrouve qu’une page et demie dédié à ce segment (pages 53-54). Très peu, vous en conviendrez.

LE TOURISME D’AFFAIRES AU QUÉBEC

Le tourisme d’affaires et congrès au Québec, c’est pourtant de la grosse business. En 2011, on estime qu’il a généré des dépenses de plus de 972 millions de dollars. Fait à noter, 68% des retombées économiques proviennent de touristes étrangers, soit 661 millions de dollars en argent neuf.

D’ailleurs, le Palais des Congrès de Montréal figurait au premier rang, en 2012 et 2013, des villes nord-américaines ayant accueilli des événements internationaux, coiffant des villes telles que Las Vegas, New York, Toronto ou Chicago. Quand même!

D’ailleurs, le nouveau président directeur général de Tourisme Montréal, Yves Lalumière a clairement affiché ses couleurs lors de ses premières sorties publiques à l’automne 2013: Tourisme Montréal s’apprête à prendre un virage “affaires” plus marqué.

Même si les nuitées générées par ce segment de marché sont passées de 180,000 en 2009 à 300,000 en 2012, il y aurait encore place à amélioration. Parmi les moyens envisagés: investissements promotionnels accrus sur des marchés de proximité (Toronto, Ottawa, New York, Washington, Boston), agrandissement éventuel du Palais des Congrès, solution permanente au toit du stade olympique, etc. Montréal est reconnue comme ville festive, on souhaite maintenant dire “Montreal means business” aussi.

Du côté de la ville de Québec, l’union fera la force alors que le Centre des congrès de Québec (CCQ), l’Association hôtelière de la région de Québec (AHRQ) et l’Office du Tourisme de Québec annonçaient il y a quelques jours une offensive commune afin de vendre la ville comme destination de congrès.

Suite aux succès de 2008, année record marquée par les festivités du 400e de la Vieille Capitale, les performances sont à la baisse mais semblent revenir. Selon le rapport annuel 2012-2103, le CCQ a accueilli 144 événements, pour 214 000 participants et générant 168 000 nuitées avec des retombées économiques estimées à 104 millions de dollars.

Le centre de villégiature de Tremblant
Le centre de villégiature de Tremblant

Mais le tourisme d’affaires n’est pas qu’un enjeu urbain, loin s’en faut. Selon l’Association des Bureaux de Congrès du Québec (ABCQ), qui représente 27 destinations et régions à travers la province, la tenue de plus de 2,000 congrès et événements a généré plus de 150 millions de dollars dans l’économie des régions en 2012 par l’entremise de la clientèle touristique liée aux congrès et réunions d’affaires de 50 nuitées et plus.

Pensons notamment à une destination comme Tremblant, avec son offre éclatée d’hébergement, centre des congrès et aéroport de la Macaza liant Toronto et le nord-est américain avec le centre de villégiature. Le tourisme d’affaires offre l’avantage de remplir les centres de villégiature en semaine et durant les saisons creuses, à l’automne ou au printemps, alors que le tourisme d’agrément est traditionnellement moins au rendez-vous.

3 TENDANCES À SURVEILLER

Comme toute industrie, on remarque certains phénomènes marquant le tourisme d’affaires. Voici donc trois tendances lourdes qu’il sera bon de surveiller, pour lesquelles les destinations et prestataires touristiques feraient mieux de s’adapter afin de ne pas perdre de leur compétitivité:

1. Démarcation moins évidente entre tourisme d’affaires et d’agrément

Les anglos ont même inventé un mot pour désigner ce phénomène: bleisure! (contraction des mots business et leisure) De plus en plus de voyageurs d’affaires en profitent pour étirer un séjour avec une composante d’agrément, invitant conjoint ou conjointe et même les enfants à venir les rejoindre.

Lors d’un sondage effectué en 2012 par la firme Orbitz, 43% des voyageurs d’affaires sondés avouaient avoir fait au moins un voyage en compagnie de conjoint ou conjointe.

On le sait, particulièrement en Amérique du Nord, les vacances payées sont une denrée rare. Plusieurs en profitent ainsi pour greffer 1-2 journées additionnelles lors d’un voyage d’affaires, soit dans la ville hôte ou dans les provinces et états avoisinants. Une opportunité à saisir, donc, pour les régions et centres de villégiatures gravitant autour de grandes villes…

Lire aussi: The Growing Trend of Bleisure Travel

2. Cycles de réservations qui s’allongent

Même si les réservations de consommateurs, en tourisme d’agrément, tendent à se faire de plus en plus à la dernière minute, on s’étonne peut-être d’observer des cycles de planification plus long dans le marché des réunions, congrès et événements. Grâce à des médias sociaux comme Linkedin ou des recherches en ligne, il y a certes de la prospection qui se fait en ligne avant les demandes de soumissions (request for proposals, ou RFP).

Néanmoins, les cycles demeurent long pour les grands événements attirant des milliers de participants, surtout lorsque ceux-ci effectuent des rotations dans le lieu de leur tenue. Pour la plupart des planificateurs, le cycle de planification peut ainsi prendre de 7 à 12 moins, parfois plus, avant de pouvoir trancher et passer au stade des contrats et de l’exécution.

3. La techno s’invite dans les réunions

Enfin, les nouvelles technologies font maintenant partie de notre quotidien – d’ailleurs, devrait-on encore parler de “nouvelles” technologies? Ainsi, on voudra s’assurer d’une connectivité sans faille dans son établissement ou destination, permettant un réseautage dynamique, le partage de photos et de la rétroaction en temps réel. Une bande passante qui suffit et dépasse les attentes des participants est plus prisé qu’un bon café ou un choix original de viennoiseries.

Et la techno, ce ne sont pas que les médias sociaux et le wifi disponible sur place. Ce sont aussi les bornes d’enregistrement, les cartes de visites qu’on peut télécharger dans une base centrale disponible en ligne, le paiement par carte de crédit dans tous les points de contact client, etc. Votre établissement ou destination a-t-il ce qu’il faut pour combler cette tendance?

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